À cette occasion, nous vous proposons quelques extraits de l'ouvrage de l'abbé Beitia, Notre-Dame de la Compassion, à propos de la naissance et du développement de cette dévotion.
On a médité, durant de nombreux siècles, sur la Compassion de Marie au pied de la croix. Les chrétiens vont contempler la Vierge dans toutes les circonstances de sa vie — notamment les plus éprouvantes — de l'enfance de Jésus jusqu'à son ensevelissement. Cela sera attesté fortement dès la fin du XVe siècle.
au sujet des sept douleurs de Notre-Dame
On trouve des témoignages au sujet des sept douleurs de Notre-Dame dans quelques ouvrages. Un Office de la Compassion de Notre-Dame renferme déjà sept formules attribuées au pape Innocent III († 1216) en mémoire des sept douleurs subies par Marie lors de la Passion ainsi qu'une série de prières concernant celles qu'elle a dû assumer lors de la vie de Jésus : la prophétie de Syméon ; le massacre des Innocents ; la perte de Jésus au Temple ; son arrestation ; sa crucifixion ; sa déposition de la croix et son ensevelissement.
D'autres ouvrages donneront une liste un peu différente des sept douleurs : la prophétie de Syméon ; la fuite en Égypte ; la perte de Jésus au Temple ; le récit de la trahison de Judas par Jean à Marie ; la crucifixion ; la mise au tombeau et le pèlerinage aux lieux de la Passion. Comme on peut le voir, on se préoccupe de fixer le nombre des principales douleurs de la Vierge. Cela ne se fait pas sans hésitation.
Les années 1475 vont constituer un tournant. À cette époque, la piété des fidèles se porte avec amour vers les mystères de la Passion du Sauveur. Par voie de conséquence, la dévotion envers la Mère des douleurs va également se développer. Témoins en sont les livres liturgiques, l'art, les livres de piété et de poésie religieuse.
2. La naissance et le développement à Notre-Dame des Sept Douleurs
La dévotion à Notre-Dame des Douleurs est chère aux religieuses des Flandres. Elle va être répandue par un prêtre, Jean de Coudenberghe, doyen de Saint-Gilles d'Abbenbroek et curé des églises Saints-Pierre-et-Paul de Reimerswaal et Saint-Sauveur de Bruges. Il deviendra par la suite secrétaire de Charles Quint.
La guerre civile déchire alors les Flandres. Jean de Coudenberghe ne voit d'autre remède que la prière. Il invite ses fidèles à avoir confiance en la Mère de Dieu. Il fait placer dans les trois églises dont il a la responsabilité une image de la Vierge, avec une inscription en vers, rappelant les circonstances où elle a particulièrement souffert : la prédiction de Syméon ; la fuite en Égypte ; la perte de Jésus au Temple ; le portement de croix ; la crucifixion du Christ ; la déposition de son corps entre les bras de sa mère ; sa sépulture. L'Église les rendra officielles, mettant fin à une période d'hésitation.
Sous ces icônes, Jean de Coudenberghe fait inscrire des vers. Le texte nous en est conservé dans la copie d'une lettre que, secrétaire de l'empereur, il adresse à Charles Quint pour lui expliquer les débuts de la dévotion à Notre-Dame des Sept Douleurs. Ce sont des paroles qu'il met sur les lèvres de Marie :
Sache, ô visiteur, que nous nous souvenons de nos sept douleurs : puisses-tu en tirer profit chaque jour.
Syméon avait prédit que mon cœur serait blessé par la pointe [d'un glaive] et que, Mère, je porterais les blessures [du fils] né [de moi].
Lorsqu'il y eut le massacre de la multitude des saints enfants, je l'emmenai en Égypte : n'était-il pas là bien en sûreté ?
Et je souffrais lorsque je cherchais [mon] enfant qui enseignait les choses de Dieu dans le Temple. Là, il serait arrêté, il porterait le poids de la croix.
Lorsque je l'ai vu, attaché au bois et, endormi dans la mort, en être enlevé, je fus poussée à le déposer dans le tombeau.
À tous ceux donc qui méditent nos douleurs, mon fils accordera l'abondance du salut.
Cela va attirer une multitude de fidèles. Il méditeront les mystères évoqués tout en demandant la fin des calamités subies par les Flandres : Les dévots de la Vierge, enflammés par ces vers dans ces trois églises — note Jean de Coudenberghe — commencèrent à les méditer assidûment. Pour chaque douleur, ils disaient un Notre Père et un Je vous salue. Ils priaient la Vierge, dont les douleurs s'étaient transformées en une immense joie, de transformer leurs lamentations en allégresse.
À la suite de cela, va se former une confrérie sous le patronage de Notre-Dame des Sept Douleurs. Le prince des Pays-Bas, Philippe le Beau, la favorisera. Elle se répand dans un grand nombre d'églises... car elle n'impose aucune charge à ses membres. L'approbation du pape Alexandre IV en 1495 lui communique un nouvel essor. Des miracles se produisent lorsque Marie est invoquée sous ce vocable. On notera de manière enthousiaste le succès de cette dévotion et l'influence qu'elle exerce sur les chrétiens de l'époque :
En beaucoup d'autres lieux comme dans les insignes villes d'Anvers, d'Haarlem et dans bien d'autres, on rapporte que notre fraternité a pullulé.
Les princes se feront inscrire dans la confrérie. Marguerite d'Autriche (1480-1530), gouvernante des Pays-Bas, déploiera un grand zèle. Elle fondera, à Bruges, un couvent consacré à Notre-Dame des Sept Douleurs. Les indulgences concédées par les évêques et par le pape Léon X (1475-1521) rendront populaire la dévotion aux souffrances de la Mère de Dieu. Toute une littérature — offices liturgiques ; poésie ; livres de piété ; recueil de miracles ; sermons ; traités divers — va la porter et la nourrir.
(Extrait du chapitre VI : De la compassion de Notre-Dame aux sept douleurs de la Vierge)
Pour lire la suite :
Histoire et spiritualité
Abbé Philippe Beitia
L'auteur nous introduit à l'histoire de cette spiritualité et nous explique quels bienfaits nous pouvons en tirer. Avec Marie, nous pourrons ainsi accueillir les valeurs spirituelles de la souffrance, du pardon...
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